Ce morceau est conçu comme un récit anecdotique, conté par quelqu'un qui aurait bien connu un homme appelé Gilles; homme assez cultivé (la mention des livres qu'il possède est répétitive, voire insistante), sans pour autant être devenu élitiste ou pédant.

Au contraire, il est resté très terre-à-terre, proche de ses contemporains, comme en témoignent certaines de ses réflexions sur le quotidien et sur la vie en général.

Il est décrit comme un homme sensible, curieux et désireux de découvrir des pans de cultures qu'il ne connait pas, qui lui sont parfois totalement étrangers, comme le rap.

Or, c'est cette curiosité qui le poussera à acheter un disque de rap et qui provoquera finalement ses larmes : loin d'y trouver l'inventivité et la force créatrice qu'il pensait pouvoir écouter, il est confronté à des morceaux vides de sens, remplis de clichés intériorisés par leur auteur : un discours victimaire, autrement dit, une plainte pure et simple, sans réflexion véritable.

Si la mélodie et la progression du récit semblent “boucler la boucle” et enfermer Gilles dans le chagrin ainsi que dans une violente désillusion, les deux phrases qui composent le refrain insistent sur la nécessité de ne pas se laisser séduire par un jugement trop hâtif : ce disque de rap est triste, mais il ne faut pas généraliser; d'autres sont totalement différents et correspondent à ce que Gilles aimerait y trouver, de l'art.

A travers ce personnage et ce récit fictifs, Abd al Malik met en scène le philosophe Gilles Deleuze (1925-1994) pour lui rendre un hommage : sa fragilité n'enlève rien à la beauté de son entreprise.